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03Printemps 2015

\Nœuds et Labyrinthes - Dossier\L’Islam contre l’Islam. Aux racines du tumulte

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L'SLAM contre l'ISLAM
Aux racines du tumulte

Bernard CHEVILLIAT, Antoine SFEIR, Myriam BENRAAD, Elie-Marie MAUREL, Éric GEOFFROY, Sébastien de COURTOIS

Intro dossierQue ton cœur soit le temple qui accueille toutes les croyances” : confrontés aux mises en scène macabres orchestrées par un islam dévoyé et nihiliste, on est en droit de se demander ce qu’est devenu cet appel à la tolérance lancé au XIIIe siècle par Ibn ‘Arabî,l’un des plus grands mystiques musulmans.

Après l’onde de choc de janvier 2015,il est plus que jamais nécessaire de comprendre l’origine des manifestations ultra-violentes qui se revendiquent de l’islam et de faire la part des enjeux spirituels, doctrinaux, historiques, géopolitiques ou économiques. Afin de mettre en lumière ce qui se joue aujourd’hui de décisif dans l’un des “berceaux de l’humanité”, nous donnons ici la parole à une pluralité de voix, journaliste,philosophe, politologue et islamologue.

Large dossier de 6 articles à retrouver dans ULTREÏA ! n°03

Aux racines du tumulte – Bernard Chevilliat
La grande discorde – Antoine Sfeir
Les enjeux d’une guerre fratricide – Myriam Benraad
Conflit de perspectives et mythes communautaires – Elie-Marie Maurel
La spiritualité, antidote au nihilisme – Eric Geoffroy
Chrétiens d’Orient et yézidis : des minorités traquées – Sébastien de Courtois

Pour en savoir plus, feuilleter ici les premières pages de chaque article du Dossier L’Islam contre l’Islam, aux racines du tumulte: Dossier #03 – ULTREÏA ! #03

 

INTRODUCTION

Faisant retour sur l’épopée originelle de l’islam et sur l’“effort d’interprétation” et de contextualisation nécessaire, Bernard CHEVILLIAT introduit ce dossier et s’emploie à clarifier la question de la prohibition des images et à expliciter ce que représente le Prophète pour les croyants, tout en montrant que l’expansion internationale du littéralisme wahhabite, la “malédiction du pétrole” et l’inconséquence de l’interventionnisme américain ont fait le lit du sanglant califat de Daech, désormais promu comme un mythe rédempteur de la fierté arabe et un possible retour de la grandeur abbasside. On peut discerner les prémisses de son avènement dans l’histoire du XXe siècle mais aussi en esquisser le devenir.

Antoine SFEIR, journaliste et spécialiste du Proche-Orient, tient quant à lui que“nous assistons aujourd’hui à la troisième conquête musulmane”, celle des “non-sachants” qui ignorent “jusqu’à leur propre religion”, et s’interroge sur les origines doctrinales et les conséquences de la “grande discorde” qui oppose depuis des siècles chiites et sunnites. L’actuel chaos, que l’Occident a largement favorisé, ouvre la voie à l’Iran pour s’affirmer désormais comme le “Vatican” du chiisme.

La politologue Myriam BENRAAD montre que l’intervention américaine en Irak, le renversement de Saddam Hussein puis la confiscation du pouvoir par les chiites ont transformé un état conflictuel en guerre civile, elle-même précipitée en 2006 par la destruction du dôme de la Mosquée d’or à Samarra, un haut lieu du chiisme. Les violentes tensions qui perdurent depuis des années sont l’une des principales causes de l’offensive fulgurante des sunnites de l’État islamique.

Entre sunnisme, métaphysique et légaliste, et chiisme, “mythologique” et mystique, l’islamologue Elie-Marie MAUREL relève que les risques de pathologie religieuse sont distincts : obsession d’uniformité formelle d’un côté et sectarisme mystico-politique de l’autre, et rappelle que le concept de guerre religieusement légitimée prête le flanc à des abus et des récupérations vite investis, en l’absence d’une élite spirituelle, par des intérêts politiques, des dévoiements idéologiques et des pathologies psychosociales.

Les derniers événements viennent confirmer la pertinence de l’analyse de l’islamologue Éric GEOFFROY sur la crise spirituelle de l’islam qui, en Occident, “s’exprime par une errance morale, existentielle” et en pays musulman “par un malaise civilisationnel, postcolonial et par une viscérale culture du ressentiment”. L’islam nihiliste et dévoyé des djihadistes, qui nie “la valeur première de l’islam, la miséricorde”, appelle un renouveau spirituel par le soufisme.

Massacres, destructions des lieux de culte, kidnappings et “reventes” des femmes par Daech concernent aussi et surtout les minorités kurdes, chrétiennes ou yézidis, comme Sébastien de COURTOIS le rappelle. Le nombre de chrétiens en Irak a diminué de moitié en douze ans, dont une majorité a fui en pays kurde.